mercredi 31 octobre 2007

Quiz du jour : dans quel dictionnaire peut-on trouver «catalographie» ?

Un métier indispensable à la vente publique : la catalographie

LAURE EGGERICX

jeudi 25 octobre 2007, 13:57

Métier de l'ombre, il est inséparable de la vente publique autant qu'il lui est indispensable. Le cas de la librairie Henri Godts.

L'importance de la Belgique au niveau du livre est connue et reconnue. The Romantic Agony, Morel de Westgaver, Ferraton, Lhomme à Liège, pour ne citer qu'eux, les libraires qui pratiquent les ventes publiques ont chacun leur aura. À côté de ces grands noms, une masse d'anonymes jusqu'il y a peu, œuvre à la confection des catalogues. Ce métier méconnu existe aussi avec plus ou moins d'envergure dans les salles de ventes d'antiquités et d'arts ancien et moderne. Mais le livre constitue un domaine à part. Il a ses spécialistes, ses salles de ventes attitrées, ses collectionneurs et sa manière de fonctionner. Aujourd'hui, le nom des catalographes commence à être mentionné dans le colophon des catalogues.

La passion

Henri Godts s'occupe de la clientèle, des expertises, des successions et partages. Il « crie » les ventes publiques et assure la rédaction des notices des manuscrits anciens et des estampes. Autour de lui quelques passionnées décortiquent les ouvrages mis en vente, jamais les mêmes « même si ce sont des exemplaires d'une même édition, il s'agit chaque fois d'un autre cas », explique Delphine Strauven, catalographe spécialisée dans les ouvrages XVe-XVIe, les livres en anglais et en néerlandais ainsi que la cartographie.

Ce métier confidentiel, elle en ignorait l'existence avant d'avoir mis les pieds chez Godts où elle a été formée par Carine Deprez. Celle-ci travaille depuis près de 25 ans dans le domaine et continue à trouver son métier « génial : on apprend et on découvre tous les jours, on brasse tous les domaines du savoir, du XVe siècle au XXe. Le livre permet de voir l'histoire par le petit côté de la lorgnette. On y voit le monde. Même des bouquins de rien du tout témoignent de quelque chose (la vie d'un explorateur, celle d'un courtisan…). On est proche de ceux qui les ont écrits.

C'est un infini plaisir que de toucher des documents habituellement exposés dans des vitrines de musées : des manuscrits enluminés, de très belles éditions du XVIIIe siècle ou une originale des Essais de Montaigne. Rien de plus extraordinaire que d'avoir des textes fondateurs entre les mains ! On est au plus près du passé, de ce que les gens ont vécu surtout lorsqu'il s'agit de lettres autographes – ou de leur imaginaire par exemple lorsque la Californie était représentée comme une île dans la production cartographique !

Et lorsque l'on a la chance d'avoir une bibliothèque entière entre les mains, on peut sentir l'âme du bibliophile et mettre en valeur ses choix. »

Des infos précises et rigoureuses

Magie, émerveillement reviennent dans les propos des catalographes, issues de mondes différents mais toutes prises à fond par la déferlante, irrésistible et séductrice. Leur profession ne s'apparente ni à celle de marchand, ni à celle de chercheur. Sous des dehors de rat de bibliothèque, elle a des implications commerciales : le but ultime est la vente via la transmission d'informations précises et rigoureuses avec éventuellement une appréciation, un extrait choisi avec soin, une anecdote, un détail pour donner le ton.

« Il faut ramasser l'information, tout dire en peu de mots. La concision est la règle numéro un, sans pour autant tomber dans le style télégraphique », stipule Carine Deprez, insatiable en termes de découverte et intarissable à propos de sa profession.

Évolution constante

Métier de passion et de feeling – « il faut sentir le livre, le toucher, avoir du flair et repérer l'adresse bibliographique, le titre ou le détail qui en fait quelque chose de spécial » –, il a changé au fil du temps : des petites mains qui collationnaient les données à l'époque où les libraires se succédaient de père en fils et, brassant énormément de livres, avaient une connaissance intrinsèque permettant de rédiger leurs catalogues eux-mêmes, aux universitaires qui étoffent désormais les notices catalographiques.

Formés sur le tas

Aucune étude ne prépare au métier en Belgique. Ces universitaires sont des historiens, romanistes ou journalistes formés sur le tas. Une connaissance de la bibliographie couplée à un regard critique qui donne à jauger l'exemplaire par comparaison et à le déchiffrer leur permet de faire passer quelque chose au lecteur – et acheteur potentiel – dans le catalogue en mettant le doigt sur « le » passage représentatif de tout le contenu.

Le métier présente plusieurs spécificités, comme le résume Carine Deprez : « la responsabilité de la mise en valeur objective de la marchandise confiée par les clients et la description de ladite marchandise avec primo tout ce qui concerne la description et l'état (la condition), secundo vérifier si le livre est complet ou non, s'il est enrichi (suites, envois, opuscules, provenances…).

Définir ensuite l'édition (originale ou seulement en partie, contrefaçon, édition clandestine ou à compte d'auteur, première édition illustrée, tirage…) et de donner le contexte historique, littéraire, scientifique dans lequel l'œuvre a émergé.

Après la rédaction de la fiche, il s'agit de mettre les prix en fonction du marché et de la marchandise. Ensuite viennent la correction d'épreuves et la mise illustrée sur le web en trois langues. »

Autant dire un programme sans relâche avec une prévalence de contacts livresques, ce qui tombe bien pour ces fascinées du livre qui à chaque vente se retrouvent au cœur de l'univers bibliophile.

source : Le Soir


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