"La Libre" entame une enquête en treize épisodes sur les terribles semaines qui ont ébranlé le monde bancaire belge. Chacun, dans notre pays, s’est senti interpellé, concerné par l’effondrement des symboles de la finance nationale. Pierre loppe ET Philippe Galloy Mis en ligne le 06/12/2008 entretien Peut-on déjà tirer de premiers enseignements de la crise actuelle ? Ce n’est pas la fin du capitalisme. C’est la fin d’une certaine époque dans l’histoire du capitalisme caractérisée par une hypertrophie des activités purement financières dans la vie économique et une culture du risque devenue excessive dans le secteur bancaire. Cela se mesure de façon inégale d’une institution à l’autre. Le point de départ, ce sont des attentes des dirigeants et des actionnaires des institutions financières en matière de rendement et de profit qui sont devenues excessives. Ces objectifs n’ont pu être que momentanément atteints moyennant la prise de risques de plus en plus grands. Le subprime est l’exemple le plus parodique de ce phénomène. Tout cela pour gagner quelques points de rendement supplémentaires. Un autre aspect, c’est le développement des produits structurés mélangeant des risques de toute nature, des produits de plus en plus sophistiqués. Ceux-ci sont devenus de plus en plus difficiles à comprendre et à maîtriser par la clientèle des banques et par la direction générale de ces établissements. Tant qu’ils contribuaient à la croissance des bénéfices, ils ne suscitaient pas suffisamment d’attention et d’inquiétude à ce niveau. Un autre constat, c’est l’opacité des produits de plus en plus difficiles à comprendre et des risques de plus en plus difficiles à localiser. Lorsque la méfiance a brutalement succédé à l’insouciance, une paralysie générale des relations interbancaires s’est installée. Car, avant même que les clients des banques ne s’inquiètent, ce sont les banques entre elles qui ont cessé de se faire confiance! Une partie de ces considérations auraient très bien pu être formulées avant la crise... Tant que les prix des actifs montaient, personne ne s’inquiétait, je le répète. Ni les épargnants ni les dirigeants des institutions financières. Je ne dis pas que les banquiers centraux ont prévu l’intensité de cette crise. Il faut rester modeste. Mais les banques centrales ont été parmi les rares intervenants à attirer l’attention, dès le début 2007, sur le fait que les prix sur les marchés ne pouvaient pas continuer à grimper éternellement et que les risques étaient sous-estimés. Je sais très bien que les banquiers centraux sont considérés souvent comme des oiseaux de mauvais augure. Nous considérons toutefois que nous avons mis en garde. Aucune institution n’a prévu l’ampleur de cette crise, c’est clair. Malgré cela, on écrira beaucoup de livres dans les prochains mois pour affirmer que la crise était inéluctable. Le pire est-il passé ? C’est une question très délicate. Une première phase de la crise financière s’est ouverte aux Etats-Unis au printemps 2007 (crise des subprimes). En Europe, le 9août 2007 a été une date cruciale. BNP Paribas a suspendu momentanément le remboursement d’un certain nombre de ses fonds. Le marché de l’argent à court terme en Europe s’est soudain figé. On parlait de "turbulences financières" se caractérisant par un écart inhabituel entre les taux interbancaires et les taux officiels. Une deuxième période de la crise a été ouverte suite à la faillite de Lehman Brothers à la mi-septembre. Contrairement à l’idée reçue, il est apparu qu’une grande institution pouvait faire faillite et que les autorités pouvaient la laisser tomber. La crise financière est alors devenue mondiale et a frappé en particulier l’Europe. Les banques les plus vulnérables ont été immédiatement attaquées, l’exemple étant évidemment Fortis. Parce qu’elle avait comme d’autres des produits dits toxiques en portefeuille et parce qu’elle avait un problème spécifique lié au rachat d’ABN Amro qui s’avérait de plus en plus problématique. En Belgique en particulier, on a évité le pire à savoir la faillite d’une banque. Ceci dit, la situation n’est pas encore normalisée. Les tensions sur le marché monétaire persistent, les taux interbancaires ont baissé parce que les taux officiels ont été diminués mais il demeure un écart toujours anormal. A travers le monde, diverses banques devront donc encore être recapitalisées parce que les exigences se sont en effet accrues. Le troisième problème est celui des cours boursiers qui restent extrêmement volatils après avoir baissé fortement pour les valeurs financières d’abord, pour l’ensemble des valeurs ensuite. La situation reste tendue. Par recapitalisation, entendez-vous intervention des autorités publiques ? Les recapitalisations peuvent prendre des formes différentes selon les institutions et les Etats et être effectuées par des acteurs privés et publics. Que pensez-vous des mesures prises jusqu'ici ? Depuis plus d’un an, on a pris des mesures exceptionnelles. Du côté des banques centrales, des injections énormes de liquidités ont eu lieu pour continuer à faire tourner le système financier. Il fallait faire circuler le sang dans la vie économique. Sur le plan de la gestion des liquidités, la Banque centrale européenne et les banques centrales de l’eurosystème ont pris des mesures tout à fait fortes. On en est arrivé aujourd’hui à proposer des liquidités aux banques sans limite, à taux fixes, pour des périodes allant d’une semaine à six mois. Ces liquidités, nous ne les offrons pas gracieusement aux banques. Nous demandons un certain intérêt et des garanties. La BCE est également devenue plus souple quant à la nature des garanties qu’elle revendique. Enfin, dès que les perspectives en matière d’inflation l’ont permis, la Banque centrale européenne a utilisé l’arme des taux d’intérêt. On peut penser ce qu’on veut mais en terme d’histoire économique et financière, une baisse des taux de 175 points de base en moins de deux mois c’est du jamais vu. La réunion de jeudi à Bruxelles était historique puisque c’est la première fois dans son histoire qui a près de dix ans que la BCE a procédé à une baisse aussi importante. Du côté des autorités politiques, qui aurait pu imaginer il y a trois mois que la plupart des gouvernements allaient intervenir de façon aussi massive dans le secteur bancaire avec dans un certain nombre de cas des nationalisations totales ou partielles de certaines banques. Il y a trois mois, on aurait parlé de politique-fiction. Cela n’a rien à voir avec à un programme idéologique comme celui de la gauche française en 1981! Ce sont l’urgence et le pragmatisme qui ont conduit les dirigeants de nombreux pays à prendre leurs responsabilités. On ne peut reprocher ni aux autorités monétaires ni aux autorités politiques de ne pas avoir réagi ou d’avoir réagi trop tardivement. Que faire pour éviter qu'une telle crise se reproduise ? Il reste de véritables réformes à mener à bien. Comme je l’ai déjà dit, il ne faut pas jeter la machine bancaire et financière par-dessus bord mais il faut la réviser complètement. Et l’agenda est long: la gestion des banques elles-mêmes, les normes comptables, les agences de notation, le mode de rémunération des dirigeants, les paradis fiscaux. Selon vous, comment faut-il réformer la gestion des banques ? Il faut plus de transparence, moins d’opacité. Cela implique la réintroduction dans le bilan des banques d’un certain nombre d’activités qui en avaient été sorties. Cela signifie un retour à des produits plus simples et plus compréhensibles et, de façon générale, au "core business" des banques: recevoir des dépôts et faire des prêts aux entreprises, aux ménages et aux pouvoirs publics. Cela doit s’accompagner d’une certaine régression, d’un dégonflage de leurs activités purement financières déconnectées de l’économie réelle. Il faudra aussi évidemment un meilleur contrôle interne des risques. Bien entendu, ce n’est pas seulement le contrôle interne qui a failli mais également le contrôle externe, à commencer par celui des agences de notation. On a découvert un peu tard qu’elles étaient en conflit d’intérêt, étant payées par les établissements financiers pour évaluer les produits de ces établissements eux-mêmes. Et en ce qui concerne les normes comptables ? Actuellement, ces normes imposent une évaluation à la valeur de marché. Tant que les prix grimpaient, personne ne s’en plaignait, ce qui n’est plus le cas lorsque les prix baissent ni surtout lorsqu’il n’y a plus de prix. Le problème est d’autant plus aigu que le marché n’a pas toujours raison. Il faut donc réfléchir au système de comptabilité le plus approprié possible pour chaque produit financier. La culture du risque a-t-elle été encouragée par d'autres éléments ? Oui. Par exemple, la publication trimestrielle des résultats a conduit les dirigeants d’entreprises à se focaliser sur le court terme. De même, le mode de rémunération des managers des banques pose problème. Qu’il existe un lien entre la rémunération d’un dirigeant et les performances n’est pas malsain en soi. Mais ces performances doivent être évaluées sur le moyen et le long terme, et non sur 12 mois. Tous ces éléments ayant poussé à des prises de risque excessives doivent être repensés et, dans un certain nombre de cas, revus. Reste-t-il d'autres chantiers à ouvrir dans ces réformes d'après-crise ? Il faudra aussi se pencher sur la question des paradis fiscaux, où sont localisées certaines institutions financières qui échappent à toute forme de régulation. Il y a donc énormément de points à l’agenda. Le mieux serait de trouver des solutions mondiales mais je crains que ce soit un peu difficile. Toutefois, il faudrait s’y atteler au niveau européen. A présent que la crise s'est un peu apaisée, ne faut-il pas songer à réformer les outils de contrôle ? Dans tous les pays, la banque centrale est en charge de ce qu’on appelle le contrôle macroprudentiel, de la stabilité systémique. Elle est aussi le prêteur en dernier ressort. Par exemple, dans le cadre du sauvetage de Fortis, on sait que la Banque nationale de Belgique a consenti, pendant une période limitée, des crédits exceptionnels. Ce contrôle se distingue du contrôle microprudentiel, le contrôle de chaque établissement financier en particulier, qui varie d’un pays à l’autre. Dans certains Etats, tels que l’Espagne, la France ou les Pays-Bas, cette mission est également dévolue à la banque centrale. Dans d’autres pays, c’est une institution spécifique qui s’en charge. C’est le cas en Belgique: c’est le rôle de la Commission bancaire, créée dans les années trente puis devenue la CBFA (Commission bancaire, financière et des assurances). C’est aussi le cas au Royaume-Uni par exemple. Mais concrètement, que faut-il modifier dans ce système de contrôle ? Une des leçons à tirer de la crise consistera à savoir quel est le meilleur modèle de supervision. Mais je ne veux pas entamer le débat précipitamment. Toutefois, il y a deux choses dont je suis convaincu. Premièrement, là où il existe des distinctions entre contrôle microprudentiel et macroprudentiel, il faut une articulation extrêmement étroite entre les deux. Le contrôleur microprudentiel doit avoir à l’esprit les risques systémiques liés à toute institution financière d’une certaine importance. L’autorité qui surveille le risque systémique doit quant à elle recevoir une information complète et immédiate sur la position de chaque établissement financier d’une certaine importance. Bref, là où il existe une séparation de ces fonctions, il faut resserrer les liens. La loi de 2002 en Belgique a été une première étape dans cette voie. Et ensuite ? Deuxièmement, il faut un système européen de superviseurs. Pour les grandes institutions transfrontalières, il faut disposer d’une vision globale de leurs engagements. Il faut un système intégré mais décentralisé de supervision bancaire, à tout le moins à l’échelle de la zone euro. Ce que l’on a fait en matière de politique monétaire, avec un centre et des bases nationales, doit être possible en matière de supervision prudentielle. Les banques centrales doivent-elles jouer ce rôle ? Ce système doit être calqué sur l’eurosystème des banques centrales. Mais je ne dis pas que c’est cet eurosystème (Banque centrale européenne et banques centrales nationales) qui doit jouer ce rôle. Ça peut être le cas. Cet eurosystème a l’avantage d’exister. Les contacts y sont plus étroits qu’entre les superviseurs prudentiels. Ce sera aux autorités politiques de se prononcer. Sans se précipiter. Mais il faudra tout de même avancer. Que penser des différentes formules selon lesquelles les sauvetages se sont opérés ? Les sauvetages se sont opérés au cas par cas, avec pragmatisme, je le répète. Ainsi, quand il a fallu intervenir en faveur de certaines banques, personne n’est venu avec l’idée qu’il fallait nationaliser toutes les banques. A l’inverse, personne n’est venu affirmer que la nationalisation, partielle ou totale, était exclue. Il a fallu faire face à des situations largement imprévues. Il n’y avait donc aucune recette miracle, aucun modèle qu’il suffisait d’appliquer. CHAPITRE 13 - LES LEÇONS DE LA CRISE ariane van caloen et francis van de woestyne Mis en ligne le 06/12/2008 récit Quand Maurice Lippens se rend à la Commission bancaire le dimanche28 septembre à 4heures du matin, il a le visage pâle. Il n’a plus le sourire qu’il arborait sur les photos au moment du rachat d’ABN Amro. Il sait que son rêve de faire de Fortis un des grands noms de la finance internationale est devenu un cauchemar. Il sait aussi que ses heures à la présidence du groupe belgo-néerlandais sont comptées. C’est le dimanche soir que sa démission est annoncée en même temps que l’opération de recapitalisation par les trois Etats du Benelux. Depuis, il n’est plus apparu en public. Les histoires les plus folles circulent à son égard. Certains racontent qu’il s’est enfui à Cuba, d’autres qu’il s’est fait cracher dessus devant la poissonnerie du Zoute. Des histoires qui montrent le traumatisme créé par la débâcle de Fortis. Mais personne, ou presque, ne sait où en est aujourd’hui Maurice Lippens. Ce qui est sûr c’est qu’il est devenu un homme du passé. D’un certain passé, celui de cette économie belge où quelques personnes de l’establishment comme Etienne Davignon ou Georges Jacobs (l’ex-patron d’UCB) régnaient en maîtres quasi absolus. Rares étaient ceux qui osaient ouvertement les contester. Cette page-là s’est tournée. Douloureusement. Quelques jours après son départ de Fortis, Maurice Lippens a aussi annoncé sa démission du conseil d’administration de Belgacom et de Guberna, l’institut des administrateurs qui défend la bonne gouvernance. A l’heure actuelle, il siège toujours au conseil du holding GBL présidé par son ami Albert Frère. L’homme le plus riche de Belgique, lui au moins, ne l’a pas lâché. Une autre figure de l’économie belge qui aura été mise à mal par l’affaire Fortis est Philippe Bodson. L’ex-patron de Tractebel, devra quitter le conseil du holding compte tenu du vote de défiance des actionnaires lors de l’assemblée houleuse qui a eu lieu le 2décembre au Heysel (à Bruxelles). Il paie lui aussi les erreurs de jugement attribuées au conseil d’administration. Il a toutefois encore plusieurs autres mandats: il est président des conseils d’administration de trois sociétés belges cotées (Exmar, Hamon et Floridienne). Pourquoi devrait-il y renoncer? Il n’est pas le genre d’homme à se laisser abattre par un échec. Il l’a montré après sa tentative ratée de sauver de la faillite l’entreprise technologique Lernout&Hauspie. A moins que de s’être fait huer par des centaines de personnes au Heysel l’ait, pour une fois, fait douter. Les photographes ont vu des larmes couler de ses yeux au début de l’assemblée. Des larmes de tristesse ou de fatigue après des semaines affreusement éprouvantes? Car c’est bien lui et le Néerlandais Jan Michiel Hessels qui ont été les membres du conseil à entériner les opérations menant au démantèlement. Ils ne l’auront pas fait de gaîté de coeur Etienne Davignon est une autre victime de cette triste histoire. Il se raconte que c’est Philippe Bodson qui lui a proposé de devenir président de Fortis Holding. Erreur fatale d’avoir accepté à 76 ans de remplir ce rôle ingrat? Sans doute. Pendant d’interminables secondes, le ministre d’Etat et ancien commissaire européen s’est fait huer par des actionnaires en colère. Il a montré aussi un certain énervement quand l’un d’entre eux l’a agressé verbalement. Il lui a manqué quelques voix pour être élu président. C’est dur d’être contesté quand on n’en a pas l’habitude. Surtout devant toute la Belgique. Mais ce n’est pas cela qui empêchera "Stevie" de continuer son chemin et de siéger dans des prestigieux conseils d’administration comme GDF Suez où il peut faire valoir ses talents d’habile politicien et utiliser à merveille son carnet d’adresses, un des plus beaux d’Europe. Contrairement à Philippe Bodson et Etienne Davignon, Karel De Boeck a, lui, été nommé administrateur (et CEO) de Fortis avec une large majorité lors de l’assemblée au Heysel. Etonnant, car il faisait partie de l’équipe dirigeante de Fortis au moment du rachat d’ABN Amro et des investissements disproportionnés dans les crédits structurés. Il a même été responsable du "risk management". Va-t-il réussir à redonner un peu de valeur à Fortis? Va-t-il pouvoir justifier cet incroyable salaire de 800000euros? Il est évidemment trop tôt pour le dire. Pour être clair: sa marge de man - œuvre est étroite. Car Fortis est devenue une société avec un portefeuille dans des crédits structurés à risque et une activité d’assurance à l’international. Sa réussite dépend beaucoup de l’évolution sur les marchés. Pour autant bien sûr que sa nomination ne soit pas remise en cause par la suite. Karel De Boeck fait aussi partie des rares de la direction de Fortis à ne pas être passés à la trappe. Il s’en sort mieux que l’ex-CEO Jean-Paul Votron dont la démission a été annoncée le 11juillet 2008. Sur Votron circulent aussi les histoires les plus folles. On l’a vu partout, y compris dans les hôpitaux pour soigner sa soi-disante dépression. Va-t-il un jour revenir sur le devant de la scène? Cela paraît difficile à imaginer tant son nom est associé à la déroute de Fortis. En revanche, l’ex-patron de Dexia, Axel Miller, a, lui, plus de chance de retrouver une place à la hauteur de ses ambitions. Il faut dire qu’il a à peine la quarantaine et qu’il n’a pas été accusé de tous les maux comme Votron. S’il a été viré, c’est d’abord parce que Nicolas Sarkozy le voulait avec l’idée de placer un de ses anciens chefs de cabinet. Toutefois son image d’homme brillant aura tout de même été entachée. On découvrira de fait une réalité très différente avec l’arrivée des Français. Quand son successeur Pierre Mariani prend ses fonctions de CEO début octobre, il se trouve à la tête d’une banque au bord du gouffre. On ne le dit pas officiellement, mais la banque belgo-française a aussi dû faire appel à l’ELA (Emergency Liquidity Assistance) de la Banque nationale pour des dizaines de milliards y compris en dollars. Pierre Mariani découvre donc un bilan de Dexia d’une immense fragilité. Ce bilan est le résultat, entend-on dire, d’une forte politique d’expansion internationale dans le métier de financement aux collectivités locales menée entre2005 et2008. Et Axel Miller n’y est pas pour rien. Il devait être conscient de ce déséquilibre, peut-être a-t-il même cherché à résoudre ce problème, mais sans doute a-t-il été pris de court par la crise. Lui aussi Cela l’empêchera-t-il de retomber sur ses pattes? Personne ne nie son intelligence supérieure. Dans ce monde financier en pleine mutation, cela pourrait être utile. A l’inverse des banques, il n’y aura pas eu de démissions du côté des autorités de régulation. Pourtant, au lendemain du plan de sauvetage de Fortis, les critiques contre la CBFA ont fusé. L’institution et indirectement son président,Jean-Paul Servais, se sont retrouvés être la cible du monde politique, plus particulièrement des socialistes tout contents de s’attaquer à l’ancien chef de cabinet de Didier Reynders (MR). Pourquoi la CBFA n’a-t-elle pas empêché le désastreux rachat d’ABN Amro par Fortis? Comment se fait-il qu’elle n’ait pas exigé une meilleure transparence et des provisions plus élevées sur le portefeuille de crédits structurés? Début octobre, exténué par plusieurs nuits blanches, Jean-Paul Servais s’est longuement défendu en Commission de la Chambre. Il sait qu’il lui faudra revenir plus tard, quand tout se sera un peu apaisé, avec des propositions plus concrètes pour améliorer le contrôle prudentiel du secteur financier. Il sait qu’il faudra aussi venir avec des solutions pour mieux appréhender le risque de liquidité. Pour cela, les autorités prudentielles devront avoir une approche plus macroéconomique et donc un meilleur dialogue avec les banques centrales. Guy Quaden, le gouverneur de la Banque nationale, aura, lui, été moins mis sur la sellette que Jean- Paul Servais. Normal? C’est vrai qu’il devait jouer son rôle de prêteur en dernier ressort et d’intermédiaire avec la Banque centrale. Pas de quoi remettre en cause son poste, pensent certains. Il reste que d’autres dirigeants à la Banque nationale ont été nettement plus visibles que lui au plus fort des opérations de sauvetage. Ce fut notamment le cas de Luc Coene, vice-gouverneur et membre du comité de pilotage mis en place par le gouvernement. Coene était visible, rue de la Loi, à la CBFA, partout où il y avait des photographes. Il est toujours apparu calme et serein même si les choix du comité de pilotage ont parfois été mis en doute par l’un ou l’autre banquier. Certains ont vu dans cette omniprésence voire cette assurance une façon de se mettre en avant alors que le mandat du gouverneur arrive à échéance début 2009. Coene, ancien chef de cabinet de Verhofstadt, va-t-il détrôner Quaden? On entend la question de-ci de-là. Ce qui montre que derrière le sauvetage des grandes banques belges, il y pourrait aussi avoir des enjeux plus personnels qui se jouent C’est peu dire que Didier Reynders était, lui, dans son élément. A la "Une" de l’actualité un mois et demi durant, matin, midi, minuit, Didier Reynders a dû goûter chacun des instants de gloire que cette crise lui a offerts. Le tandem qu’il a constitué avec le Premier ministre, Yves Leterme, a bien fonctionné. D’ailleurs, plusieurs des témoignages que nous avons recueillis, (c’est "off the record" bien sûr) nous ont fait comprendre que le leader du duo était en réalité le ministre des Finances. Souvent, Yves Leterme lui a laissé la politesse: c’est D.R. qui a eu le privilège d’expliquer, aux collègues, les opérations en cours. Il faut dire que dans ce milieu où le carnet d’adresses est essentiel, où les relations comptent autant que les compétences, Didier Reynders avait une longueur d’avance sur le Premier ministre. Lui qui est "à tu et à toi" avec les bonzes de la finance, avec les autres ministres des Finances et les gouverneurs des banques nationales européennes, il a pu, en pianotant sur son "Blacberry" établir les connexions indispensables au niveau européen. Même si les socialistes conservent un goût amer du sauvetage des institutions belges, une opération dont ils ont été gentiment écartés - à l’exception notoire de l’opération Ethias - Didier Reynders a trouvé, dans ces semaines d’âpres négociations, l’occasion de redorer un peu une image passablement écornée sur le terrain politique belge. Finalement, ce dossier lui a permis de lancer haut et fort la campagne électorale pour le prochain scrutin régional, européen (et fédéral?) en mélangeant, dans un joyeux cocktail, la mauvaise gestion des banques belges et les scandales à Charleroi. Merci la crise? Le Premier ministre belge, Yves Leterme, s’est quelque peu révélé dans ce tourbillon politico-financier et bancaire. Depuis qu’il était arrivé sur la scène fédérale, il avait accumulé les échecs, contraint de louvoyer, de battre en retraite, d’abandonner ses objectifs. Sur le plan communautaire, évidemment, mais aussi sur le plan économico-social et dans le dossier très délicat des réfugiés. Heureusement, Yves-La-Gaffe, semble avoir pris, très vite, l’exacte mesure de la crise financière qui s’abattait sur la Belgique. Lui, l’homme des chiffres, n’a eu aucun mal à comprendre les enjeux véritables de cette tempête et a compris illico la nécessité d’agir vite. Sans quoi, si les autorités avaient laissé s’effondrer ces banques systémiques, c’est toute l’économie belge qui se serait écroulée. Ici, Yves Leterme et Didier Reynders, les deux vrais gestionnaires de la crise, ont réussi à limiter les dégâts. Car évidemment, il y a eu des dégâts. Colossaux. Si les épargnants ont été "épargnés", si le personnel des entreprises n’a pas (encore?) été touché de plein fouet, on ne peut pas en dire autant des actionnaires qui eux, ont tout perdu. Tout. Pas des spéculateurs sans foi ni loi. Non. Des familles qui avaient placé le fruit d’une carrière ou l’héritage familial dans des produits qu’ils croyaient sûrs, gérés, leur mentait-on, en bon père de famille. Pouvait-on faire autre chose? Oui répondent ces actionnaires lésés. Non, rétorquent les responsables politiques car "le monde a basculé en 24heures". The day after, il n’y avait plus rien. Ni crédits interbancaires, ni management. L’avenir d’Yves Leterme? Ce n’est pas lui qui en décidera. Mais bien les partenaires qu’il a réunis au sein d’une improbable coalition qui se cherche toujours. Même s’il a repris un peu d’ascendant, on ne peut pas dire qu’il soit devenu très convaincant. Les difficultés qu’il a éprouvées pour mettre au point un plan de relance démontrent à souhait la difficulté qu’il a, qu’il aura toujours, à être un vrai chef d’équipe, un leader visionnaire. Mais assez de regrets: si les Lippens, Votron, Verwilst et Miller avaient été ministres, auraient-ils fait mieux? source : La LibreSecrets Bancaires
"Ce n’est pas la fin du capitalisme!"
"C’est la fin d’une certaine époque. La culture du risque était devenue excessive dans le secteur bancaire", affirme Guy Quaden, gouverneur de la Banque nationale, qui s’attend à ce que certaines banques soient encore recapitalisées à l’avenir à travers le monde."Ce n’est pas la fin du capitalisme!"
Quels lendemains pour ces hommes au coeur de la crise?
Quelles traces laissera la crise sur les banquiers, les régulateurs et les hommes politiques? Il y aura eu des démissions mais aussi peut-être des révélations!Quels lendemains pour ces hommes au coeur de la crise?
vendredi 26 décembre 2008
Secrets bancaires @ La Libre # 13
"C’est la fin d’une certaine époque. La culture du risque était devenue excessive dans le secteur bancaire", affirme Guy Quaden, gouverneur de la Banque nationale, qui s’attend à ce que certaines banques soient encore recapitalisées à l’avenir à travers le monde.
Quelles traces laissera la crise sur les banquiers, les régulateurs et les hommes politiques? Il y aura eu des démissions mais aussi peut-être des révélations!
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