lundi 12 novembre 2007

Stratégie en bourse

Le contexte actuel de crise est-il favorable aux actions?

Le trio magique du pétrole, de l'or et de l'euro renoue une fois de plus avec les records. La devise européenne a franchi hier pour la première fois la barre de 1,47 USD, dopée, selon des cambistes, par des commentaires d'un responsable chinois.

(l'écho) - Celui-ci a suggéré que Pékin pourrait réduire ses réserves en billet vert au profit d'autres monnaies, dont l'euro. Parallèlement, l'or, réputé comme valeur refuge en cas d'incertitudes économiques, a grimpé jusqu'à un pic de 845,84 dollars l'once, son plus haut depuis 28 ans. «Le dollar faible va pousser l'or à 850 dollars et même à 860 dollars l'once», prédit Ben Coleman, courtier à Trade Index. «L'effet devise influe fortement sur l'or, le pétrole et les métaux de base», ajoute-t-il. Enfin, les cours du pétrole se sont acheminés vers les 100 dollars le baril à New York, la publication d'un rapport de l'Agence internationale de l'énergie ayant mis le feu aux poudres. L'AIE prévoit un bond de 55% de la demande énergétique mondiale d'ici 2030, tiré par la Chine et l'Inde.

Une toile de fond inquiétante pour les actions

Au vu de l'appréciation quasi ininterrompue de l'euro, de l'or et du pétrole depuis le début de l'année, jouer ces tendances sur les marchés d'actions semble tentant. Toutefois, les stratégistes que nous avons interrogés rappellent le contexte difficile des marchés d'actions. «Ces derniers adoptent un comportement schizophrénique», s'inquiète Eric-Tazé Bernard, directeur de la multigestion auprès d'Invesco Asset Management. «Le contexte actuel est délicat pour les actions avec la crise du subprime et des valorisations trop chères pour certains secteurs», constate, pour sa part, Franz Wenzel, directeur adjoint de la stratégie chez Axa Investment Management.

Les deux stratégistes optent pour un biais sectoriel différent. Eric Tazé-Bernard joue la prudence et mise sur les secteur défensifs comme les télécoms et la pharmacie, tout en pariant sur la technologie. «Les schémas classiques de stratégie d'investissements ont du mal à s'appliquer. On observe actuellement sur les marchés des comportements d'investisseurs à court terme comme les hedge funds qui jouent des tendances très spéculatives», explique-t-il. Le stratégiste d'Invesco Asset Management illustre ses propos en prenant des exemples sectoriels. «La faiblesse du dollar aurait dû impacter les secteurs industriels européens tournés vers l'export comme l'automobile, les biens d'équipement ou la construction aéronautique. Or, cela ne s'est pas produit», observe-t-il. En effet, le DJ Stoxx 600 Automobile & Pièces détachées a grimpé de 40,6% depuis le début de l'année, alors que l'euro a gagné plus de 11% par rapport au dollar sur la même période. «De même, le secteur européen de l'énergie, traditionnement sensible à la hausse du pétrole, n'a pas tellement réagi à sa progression spectaculaire. Il semble avoir perdu sa vertu cyclique», souligne Eric Tazé-Bernard. Le DJ Stoxx 600 Oil & Gas a pris seulement 9,84% depuis janvier alors que les cours de l'or noir ont progressé de plus de 40% sur la même période.

Encore des opportunités

Franz Wenzer se veut lui plus optimiste. «Toute la partie des matières premières reste un thème à jouer pour les investisseurs», indique-t-il. «Les entreprises américaines d'exploration et production bénéficient pleinement de la hausse du pétrole, contrairement aux grandes compagnies intégrées européennes», ajoute-t-il. Il conseille aussi de privilégier une approche régionale. «Jouer le Canada et la Russie permet de profiter de la hausse du pétrole. Le Brésil et le Mexique représentent aussi des paris intéressants pour les matières premières», relève t-il.

La faiblesse du dollar offre également des opportunités selon le stratégiste. «Les secteurs des matériaux et de l'industrie bénéficient de cette tendance, car avec un dollar faible, ils paient moins cher leurs matières premières libellées dans cette monnaie», commente-t-il. A contrario, il déconseille d'investir dans la pharmacie. «Jusqu'à 70% des revenus du secteur sont liés au billet vert. Celui-ci va souffrir», prédit-il. Les valeurs financières européennes doivent aussi subir le même sort, selon Franz Wenzer. «Celles-ci disposent d'une corrélation négative avec le dollar. Non seulement elles souffrent de l'euro fort, mais aussi de la crise du subprime dont la fin ne semble pas proche», précise-t-il.

Jennifer Nille

14:41 - 08/11/2007
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